Et puis tu meurs

4h45 (du matin), je cours sur la Prom.

Hier, c’était l’arrivée du Tour de France.

Alors, je croise un ballet d’aspirateurs géants, aux sirènes orange criant, trois mecs qui volent une banderole officielle, l’air de rien, deux jeunes gens la langue dans la bouche, et un mec louche dans une twingo rouge.

Vous vous demandez peut-être ce qu’ils ont tous en commun ?

Tous m’ont fixé cavaler avec un jugement que je situe entre « quel athlète » et « mais c’est le fou du village ». Y’en a qui ont même arrêté de se lécher les amygdales.

Je me pose au port.

Les seuls bruits qui me parviennent, sont ceux de mes pas filants, et des feuilles au vent.

Je vois des fantômes, la pleine lune qui flotte, un chasseur de trésors.

Et puis va me demander pourquoi, je finis au bord d’une falaise.

Il est 5h25, et les goélands, rois des plages, gouvernent le royaume jusqu’à 9h.

Le soleil se lèvera peu avant 6h, et tout est d’un noir profond.

On distingue à peine le ciel de la mer.

Du bord de mon précipice, vertigineux, je contemple la masse d’eau s’écrasant en bas contre les rochers. Je fais face à l’eau et aux bourrasques violentes.

J’aperçois la lampe d’une plongeuse. Puis son tuba, enfin ses palmes.

Et puis va me demander pourquoi, je finis les pieds dans le vide.

Une maladresse conduirait à une fin brève et inopinée.

Et, je me rends compte que je suis un rocher.

Pas que je m’identifie comme un rocher, et ne m’en voulez pas pour la vanne, mais plutôt : face aux défis de la vie, je me sens comme un rocher : puissant, insubmersible.

Je suis un putain de caillou, mais l’érosion me gagne, comme nous tous : nous, humains, qui avons tous une date d’expiration.

Alors je me rappelle, sur cette falaise, ma condition de mortel.

« Memento mori »

Que mon temps sera bref, et qu’il serait préférable de l’utiliser autrement qu’en matant des séries débiles.

Non, je préfère vivre d’art, de mouvement, d’amour, et écrire des fables.

<<< Lire ma nouvelle fable >>>

Nous vivons trop souvent comme si nous n’allions pas mourir.

Et on accueille chaque difficulté comme si c’était une catastrophe.

C’est idiot.

« Rien ne rend aussi présent à soi-même, aussi conscient de l’instant comme d’être à quelques centimètres de sa propre mort ».

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